De l'Ecole des femmes à Top Hat, du Mariage de Figaro à Tucker & Dale vs Evil, le quiproquo tresse astucieusement ses ramifications sur la trame narrative, suscitant des malentendus des plus désopilants lorsque le nœud est dénoué.
Il ne faut cependant pas cantonner le quiproquo au comique, Edmond Rostand l'ayant superbement utilisé dans son Cyrano de Bergerac pour que le héros, au début du livre, croie lors d'un dialogue avec Roxane qu'il est aimé d'elle, lors qu'icelle lui parle d'un autre. La dissipation de l'erreur se révèle des plus cruelles.
Maintenant, terminons-en avec les exemples pédants, penchons-nous plutôt sur la genèse d'un bon quiproquo. Il vous faut d'abord choisir deux parties, l'une étant destinée à se méprendre sur ce que sait ou annonce l'autre. Il vous faut ensuite trouver le point saillant sur lequel porte le malentendu.
"Ruppert marchait à grandes enjambées dans la maison, cherchant activement Maggie pour lui annoncer l'heureux événement : il avait réussi à faire marcher la garantie de la machine à laver, qui ne marchait plus vraiment bien depuis peu ! Maggie, elle, brûlait d'avoir des nouvelles de sa malheureuse sœur, qui avait fait une fausse couche la veille au soir."
Il vous faut ensuite faire preuve, et c'est sans doute là où le bât risque de blesser, d'ingéniosité, en trouvant des phrases à double sens permettant à la méprise de s'instaurer puis de durer.
"— Ça y est ! lança Ruppert les yeux brillants, j'ai enfin eu des nouvelles !— Dis-moi tout mon chéri, comment va-t-elle ?— Eh bien, comme nous craignons, ma chère Maggie, elle ne va pas bien fort.— C'est bien ce que je craignais, hélas ! Je pense qu'il va falloir nous en occuper. Avec des soins adaptés, elle pourra s'en remettre.— J'ai bien peur que non, Maggie. Vois-tu, on m'a dit à l'instant même qu'elle ne sera plus jamais bonne à rien, qu'on ne peut plus en espérer grand-chose.— Mais comment peux-tu dire ça ! Tu es donc un monstre ? Elle nous a rendu tellement de services ces dernières années !— Malheureusement elle n'est plus en état de nous en rendre d'autres, il faut voir les choses en face. Ne pensons plus à elle, d'autant plus qu'on pourra se débrouiller sans y perdre d'argent, car j'ai obtenu...— Et tu parles d'argent maintenant ? Mon Dieu, mais quel monstre ai-je donc épousé ! [...]"
Il ne reste plus qu'à choisir le moment où vous ferez cesser votre quiproquo, selon l'effet que vous voulez obtenir. En espérant seulement que vous en ayez le talent,
Gustave Borjay vous salue.
C'est trop affreux ! Mais c'est une présentation intéressante pour des écrivains en herbe.
RépondreSupprimerTrès drôle ! Si seulement on pouvait vivre d'aussi réjouissants quiproquos et pas seulement nos héros de romans !
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